Nazarena France

ASSOCIATION NAZARENA - FRANCE
144 rue de l'Arnel, 34070 Montpellier
Tel/fax 04 67 20 12 59


Une école d’agriculture à Aboalimena

Projet présenté par Nazarena, association créée en 2002 à Aboalimena enregistrée sous le N° 65- DIST/Belo/Ass, et soutenu par Nazarena-France, association à but humanitaire enregistrée à Montpelier en 2005

projet remis à jour en juin 2009 (version abrégée)

Introduction

L’association Nazarena « Fikambanana Nazarena Aboalimena » a été créée en 2002 dans la commune d’Aboalimena par Dera Haidaraly dans le but d’une prise en charge d’actions de solidarité et d’opérations de développement local par les paysans eux-mêmes.

L’association Nazarena-Madagascar travaille en partenariat avec l’association du même nom « Nazarena-France » Les deux présidents de Nazarena-France et de Nazarena-Madagascar étaient associés pour un travail de recherche dans la sous-préfecture de Belo-sur-Tsiribihina, « terroirs revisités » depuis 2002. Ils ont décidé de travailler à créer de nouvelles conditions de développement, et ils ont choisi le cadre de la mairie d’Aboalimena, région non couverte par les associations humanitaires, peu visitée par celles-ci et enclavée 6 mois de l’année durant la saison des pluies. Les conséquences du cyclone ont été catastrophiques dans la sous-préfecture de Belo et tout particulièrement sur le delta du Manambolo où se trouve Aboalimena. En 2004, année du cyclone Aboalimena a connu une perte totale des productions agricole, un nouveau déplacement du bras du Manambolo vers le Nord a asséché d’anciennes rizières à Be-Sihanaka. Deux saisons sans pluies ont suivi de sorte qu’en 2005, les paysans n’ont plus eu de stocks d’aucuns produits (ni riz, ni maïs, ni manioc) et que nombre de familles ont eu recours à la recherche d’ignames dans la forêt. Cette situation de pénurie était amplifiée par la faiblesse de la circulation monétaire dans ce village qui est le chef-lieu de la commune d’Aboalimena et compte 8 500 habitants

C’est en juin 2005, qu’après avoir travaillé dans l’urgence par des dons en nature et en argent « Nazarena-France » s’est constituée, officiellement, en association avec inscription au Journal Officiel et à la préfecture de Montpellier en France où se trouve le siège de l’association. Un site Web a été créé par la suite dans le but d’informer plus largement un public connaisseur ou s’intéressant à Madagascar pour lutter contre la paupérisation croissante tout en agissant, autant que possible sur les conditions de vie et de travail local. Ce site est régulièrement remis à jour.
L’orientation commune des deux associations est le résultat d’une politique concertée entre Nazarena-France et Nazarena-Madagascar. Elle s’est portée sur la formation et la mise en place de moyens d’accompagnement permettant aux villageois associés de prendre en charge leur propre développement.

Divers projets ont été développés, comme la réalisation de cultures maraîchères expérimentales ou d’activités autour de la santé. Une pratique pédagogique centrée sur la mise en œuvre de moyens et l’animation de coopératives de production a été expérimentée en 2008 après un travail d’animation de 4 mois effectué par des étudiantes en 3ème et dernière année de stage en formation « d’éducatrices spécialisées ». Toutefois, le projet de création d’une école d’agriculture à Aboalimena s’est très tôt imposé comme un projet majeur et porteur d’avenir. Nazarena-France y a consacré l’essentiel de ses moyens depuis plusieurs années. Sous l’impulsion de son président, l’association Nazarena-Madagascar a réalisé en 2008 avec le soutien unanime des instances locales (mairie, conseil communal, chefs de quartier) l’acquisition d’un terrain de plus de 3 ha situé non loin de la mairie dans le quartier d’Aboalimena Nord, qui a été encore étendu en 2009. Ce terrain a été défriché, débroussaillé et clôturé et le premier bâtiment a vu le jour à l’été 2008.

Nazarena-France et Nazarena-Madagascar ont ainsi en commun un double objectif de formation au niveau le plus pertinent en milieu rural dans un rapport nouveau avec les instances urbaines locales et nationales

1 Le programme de construction des bâtiments de l’école

Le statut du terrain de l’Ecole d’Agriculture

En 2007, Dera Haidaraly a fait une donation d’un premier terrain de 2 ha ½ sis à Aboalimena –Sud au sud-est de la mairie. Le terrain appartient donc à l’association « Nazarena-Madagascar » suite à la donation effectuée par Dera Haidaraly qui en avait fait l’acquisition auprès des précédents propriétaires. Cette procédure a été enregistrée à la commune et validée par le maire qui a signé les papiers de mutation. Le terrain a été déboisé, défriché, et clôturé et il est partiellement mis en valeur. Une nouvelle parcelle située à l’est a été acquise et a fait l’objet d’une nouvelle donation selon la même procédure, en sorte que la superficie de l’école a été portée à 3 ha1/2 environ, anticipant la nécessité d’avoir un terrain d’expérimentation suffisant pour les élèves de l’école.

 

La construction d'un premier bâtiment

Au cours de l’été 2008, avec le concours d’un architecte bénévole membre de Nazarena France un premier bâtiment a été construit. D’une superficie de 160 m2 au sol, ce bâtiment comprend deux classes de 32m2 et 13 m2 et une vaste varangue. Il s’agit d’un bâtiment de construction traditionnelle, mais dont la structure est renforcée de façon à respecter les principes de construction paracyclonique des bâtiments scolaires. Ce bâtiment est aujourd’hui terminé et il a déjà été utilisé pour lancer des ateliers d’animation destinés aux habitants d’Aboalimena (poterie, couture, hygiène et santé). Nous formons le projet d’y apporter un éclairage solaire de façon à élargir son utilisation pour y donner des cours du soir et introduire des moyens audiovisuels et informatiques.

Le bâtiment construit n’a pas pour fonction d’accueillir les ateliers. Il faudra dans l’avenir prévoir un lieu d’accueil spécifique pour les ateliers et les activités coopératives qu’ils auront engendrés.

Programme de construction à venir

Nous avons mené en 2009 des études d'aménagement du terrain en distinguant différents lieux fonctionnels comme le puits, les communs, les sanitaires, un auvent de matériel léger pour une salle à manger pouvant aussi accueillir les ateliers de la coopérative, les terrains d’expérimentation des élèves ainsi que les endroits où seront plantés des arbres fruitiers. Pour la clôture, des boutures d’arbres ont été plantées à intervalles réguliers entre lesquels sont insérés des poteaux selon la méthode des clôtures utilisées dans le village. Toute cette organisation de l’espace fera l’objet d’un plan directeur discuté point par point entre le Président et le bureau de Nazarena-Madagascar et l’architecte vice-président de Nazarena-France. Le prochain bâtiment devrait économiser au maximum les bois durs et les remplacer par du bois de construction courant.

1 Le programme pédagogique de l’école

Un pricipe directeur : la formation au cœur du développement local

Si Nazarena a donné une toute première priorité à ce projet d’école d’agriculture, c’est dans le but d’offrir à des jeunes éleveurs, pêcheurs et/ou agriculteurs un avenir qui les place au centre des stratégies de développement local. L’objectif final est à l’issue de cette formation de leur délivrer un diplôme reconnu qui leur permette de prétendre à des postes de vulgarisation agricole dans les centres vétérinaires, dans les instances du ministère de l’Agriculture, les services des forêts et de la pêche. On sait en effet, que la relève des actuels fonctionnaires en poste n’est pas assurée et, de plus, la démonstration sera faite que des paysans issus de leur milieu peuvent être les porteurs de nouvelles stratégies productives dans la mesure où ils connaissent parfaitement les obstacles qui s’opposent à toute innovation. Ils devraient être plus à même de susciter les transformations rendues nécessaires par les nouveaux enjeux de la mondialisation.

Le mot est prononcé « mondialisation » ! Oui, le Menabe du nord où se trouve Aboalimena est directement concerné par la « mondialisation ». C’est une région qui était réputée de faible densité humaine compte tenu des espaces de forêt qui alternent entre les cours d’eau des fleuves de la Tsiribihina et du Manambolo, tandis que les régions deltaïques sont couvertes de mangroves entre lesquelles se font des cultures de baiboho secs et humides et une riziculture de faible productivité. L’agriculture, particulièrement les « Hatsake » ou cultures sur brûlis forestiers ont conservé une forme extensive devant la difficulté de nettoyage des terres avant mise en culture poursuivie 3 années durant sur les mêmes terres. Il n’y a aucune mécanisation agricole, alors que celle-ci serait possible sur de grandes superficies comme cela est projeté sur l’ancienne concession de sisal « de heaulme » achetée par des investisseurs mauriciens. Des acteurs du développement existent dans les villages, mais les moyens manquent pour passer à un stade supérieur de production qui puisse permettre de réaliser des économies d’échelle. La forte demande pour le maïs demanderait du matériel agricole plus efficace que la simple charrue ou l’angady. Les superficies cultivées augmentent avec le déséquilibre population/ressources du fait des migrations et de la croissance naturelle de la population. Le « far-West » malgache, comme on a pu qualifier la région du Menabe dans les dix premières années de République n’est plus un eldorado.
Le choix de la mairie d’Aboalimena qui est une région enclavée une partie de l’année n’est pas fortuit. Il devrait permettre de bien articuler la formation théorique en tenant compte de l’environnement local – les facteurs géo-climatiques, les types d’activités associées, les sous-régions à économies complémentaires. L’objectif de la formation est centré sur l’objectif de renouvellement du personnel de vulgarisation agricole travaillant dans les services administratifs vétérinaires et des eaux et forêts dont la relève n’est aujourd’hui pas assurée. De plus, notre projet bénéficie du soutien du Docteur Djadagna, chef des services vétérinaires de la sous-préfecture de Belo- Sur-Tsiribina qui a accepté de travailler directement avec l’association, son service employant actuellement le plus grand nombre de vulgarisateurs dont la relève devra être prise par des jeunes gens de milieu rural ayant acquis une formation solide au sortir de l’école.

Les enjeux d'une formation en entrepreunariat agricole

Les principes que nous proposons pour la mise en œuvre de cette formation ont été discutés avec le Docteur Djadagna et le président de Nazarena-Madagascar en présence de la Présidente de Nazarena-France depuis octobre 2008. Cette école située en milieu rural enclavé, sera la 1ère en date. La réflexion menée est le produit du travail associatif déjà réalisé dans la commune d’Aboalimena depuis 2002 et tient compte de l’expérience et des connaissances théoriques du Docteur Djadagna. Nous pensons que c’est à travers la formation et la fondation d’une école d’agriculture que l’on peut proposer une collaboration concrète aux intellectuels et aux responsables régionaux du développement de la région Menabe pour une adaptation aux transformations nécessitées par les enjeux de la mondialisation, les projets de mise en valeur agro-industrielle des terres du Menabe, l’exploitation pétrolière et du gaz naturel et des projets privés de développement touristique des côtes. Face à de tels enjeux, la petite paysannerie locale doit trouver sa place dans le développement malgré la faiblesse structurelle de ses moyens de production : absence de mécanisation agricole, de fertilisants, de pesticides, coût élevé des semences, et prix de marché trop faibles. Devant ces difficultés, voire l’impossibilité d’accéder aux ressources humaines et techniques pour le développement dans la mondialisation, la fondation d’écoles d’agriculture diffusées en milieu rural reste une voix d’entrée pour une aide au développement local et à la production agricole par les ONG et les organismes financiers internationaux. L’école peut agir sur les mentalités par la formation des jeunes qui deviendront les acteurs de leur propre développement. Notre idée est de préparer le milieu à recevoir et utiliser au mieux les aides existantes, qu’il s’agisse de mécanisation agricole, d’aide financière pour l’utilisation de semences plus résistantes aux mauvaises herbes, aux insectes etc..

Notre pari sur l’avenir est de dire que la petite paysannerie agricole peut contribuer au développement dans la mesure où elle accède aux moyens techniques et financiers pour élever l’échelle de ses productions que les ressources humaines seules ne peuvent atteindre. Les modules de notre formation à l’entreprenariat agricole seront articulés aux problèmes réels rencontrés par les pêcheurs, les agriculteurs et les éleveurs d’aujourd’hui.

Les principes d'organisation de la formation

Notre objectif consiste à donner une deuxième chance à des jeunes gens et jeunes filles de 15 ans qui ne peuvent poursuivre leurs études et sont stoppés au niveau de T5. D’autres qui n’ont pas été atteint par la limite d’âge n’ont pas réussi l’examen d’entrée au collège de CEPE. Enfin il existe aussi ceux qui n’ont pu envisager une formation à Belo dans la ville la plus proche où se trouve le collège d’Etat d’enseignement parce que leurs parents n’en n’ont pas les moyens. A tous ces jeunes candidats nous souhaitons ouvrir la possibilité de poursuivre des études.

A ceux qui n’ont pas leur CEPE, nous proposerons une remise à niveau (par exemple un tutorat de six mois en cours du soir) de sorte que ceux qui n’ont pas leur CEPE puissent repasser l’examen avec de plus grandes chances de réussite.

Les élèves détenteurs du CEPE poursuivront un cursus scolaire théorique et pratique de trois années de spécialisation agricole à l’issue duquel ils pourront se présenter à l’examen final. L'école étant agréée par le ministère de l’Education Nationale la formation donnée sera équivalente à celle des établissements de formation professionnelle agricole du même niveau. Elle sera sanctionnée sinon par un diplôme, du moins par un certificat attestant la valeur des anciens élèves et les connaissances acquises.

Conditions d'entrée à l'école d'agriculture

Le recrutement se fera par concours sur différents critères

  1. Le niveau relatif des connaissances acquises à l’école primaire par les candidats en organisant un examen de sélection pour être en mesure de choisir ceux qui auront le mieux réussi cette épreuve.
  2. Un critère d’appartenance géographique : pour les premières promotions tout au moins, nous aurons soin d’équilibrer le choix des candidats en fonction des 8 différents fokontany de la commune d’Aboalimena de sorte qu’il n’y ait pas sentiment d’injustice d’un fokontany par rapport à un autre. Bien entendu, ce critère de choix d’appartenance géographique ne sera pas le seul, ni le premier critère retenu dans le choix des candidats
  3. Un critère d’adéquation aux objectifs de l’école d’agriculture :
    Récupération des enfants en échec de milieu rural pour leur permettre se suivre un cursus rapide d’études gratuites.
    Développer le niveau des jeunes paysans et leur donner les moyens de revenir dans leur fokontany où ils exerceront le métier de vulgarisateur
  4. .

    Les parents des élèves admis à concourir auront à passer un contrat avec l'école

    Ils s’engageront à ce que leurs enfants ne quittent pas l’école avant d’avoir fini leurs études et devront payer les dépenses engagées par « Nazarena » pour eux durant la durée des trois années d’études. Il n'y aura pas cependant d'écolage

    Une procédure spécifique pourra être envisagée pour quelques familles particulièrement démunies. Elle ne sera pas rendue publique.

    Cursus des études suivies

Les élèves entrant en 1ère année recevront une formation générale : formation en langues (français et malgache) et en mathématiques, biologie et sciences naturelles, ainsi qu’une formation spécialisée agricole. Dès cette première année, ils bénéficieront d’une formation pratique au métier d’agriculteur par la participation aux travaux de mise en valeur des terrains de l’école. Leur travail permettra d’alléger les contributions à la charge des familles.

Les deux années suivantes prévoiront une poursuite de la formation générale à laquelle seront intégrées l’ensemble des matières enseignées dans les écoles d’agricultures et vétérinaires. En effet, le contenu de la formation sera centré sur l’agriculture associée à l’élevage ainsi que sur la gestion des espaces forestiers dont on sait l’importance qu’elle présente pour le Menabe. Une formation spécifique sera consacrée à cette question ainsi qu’à la protection des mangroves . Les enseignements respecteront les programmes des établissements de niveau équivalent tels qu’ils seront édités par le ministère en charge des collèges d’agriculture.

La formation pratique sera assurée par la gestion par chaque élève d’un projet personnel choisi en fonction de ses aptitudes et entrant dans le cadre de l’organisation de l’école en exploitation agricole autonome (exploitation maraîchère, élevage et gestion d’un troupeau, gestion d’une ressource naturelle, etc.. ).

Chaque année se terminera par un examen permettant de passer au niveau supérieur. L'examen final sera sanctionné par un certificat de réussite, et le projet proposé par l'élève pourra être soutenu financièrement sous forme d'un micro-crédit.

Insertion professionnelle

A l’issue de leur formation, les élèves auront la possibilité de faire acte de candidature auprès des services d’agriculture, de la pêche et vétérinaires pour des postes de vulgarisateurs qui seront ouverts à ceux qui auront reçu une formation idéale pour s’y présenter. La première génération d’élèves ne devrait pas avoir de difficultés pour se placer à l’issue de cette formation dans la mesure où la relève ne paraît pas exister pour les personnes qui exercent actuellement la fonction de vulgarisateur.

L’un des objectifs principaux de la formation serait alors atteint : utiliser les compétences acquises par les fils et filles de paysans pour favoriser le développement agricole de leur propre région, en faire des innovateurs au sein de leur propre milieu de vie et de travail. Ils ne seront pas isolés de leur milieu d’origine et seront placés au sein même des communautés rurales pour agir sur le développement local, développer la polyculture, assurer la préservation des ressources forestières par la sécurisation foncière des lieux de pâturages traditionnels. Ainsi, la forêt sera protégée par les éleveurs eux-mêmes qui ne craindront plus d’être désappropriés de leurs terres non agricoles.